Maurice Waha
Le 7 septembre 1944, les Allemands en débandade voulurent laisser un souvenir sanglant dans le quartier Sainte-Marguerite, alors que les Américains arrivaient par la côte d’Ans. Ils firent exploser un mini-char sans conducteur au carrefour Fontainebleau, alors que des riverains faisaient la file devant un commerce.
Maurice Waha, un habitant de la rue, sauta sur ledit char pour tenter de le désamorcer. En vain. Le bilan fut sévère : 95 morts.
Mais de quel engin s’agissait-il ? Était-ce un char dont on avait lâché les commandes et qui explosa contre une maison ? Était-ce un mini-char téléguidé ou bien, du haut de la rue où trois panzers se trouvaient encore, le fit-on exploser à distance ?
Quelques 70 ans plus tard, les souvenirs, bien entendu, se sont évaporés, les légendes ont dépassé la réalité et les documents qui subsistent n’ont pas complètement éclairci le mystère.
Goliath ou pas Goliath
Tank Fontainebleau 1944
Que n’a t’on pas écrit sur l’explosion du 7 septembre 1944 à Fontainebleau!
Que n’a t’on pas fait comme erreurs d’écritures, de photos détournées à l’attribution de lieux non conformes dans la légende écrite sous celles-ci !
Des récits les plus fantaisistes les uns que les autres ont circulé. Que d’écrits rédigés par de soit-disant témoins qui ne se sont jamais trouvés sur ces lieux tragiques.
Pendant plus de trente ans, j’ai cherché , témoin involontaire en 1944, a connaître et a faire savoir la vérité sur ce drame que fut l’explosion volontaire à la libération de Liège.
La question que de nombreux liégeois se s’ont posée pendant de nombreuses années est » étais-ce un petit goliath ou non ».
Combien d’écrits ,de brochures ou de livres rédigés de bonne fois ont fait état de l’utilisation de ce petit tank lors de cette exposion.
Le SDKF 302 goliath fut construit à 7564 exemplaires . Reconnaissable, par ses faibles dimensions ( 1m20 de long,0,61 de large et plus ou moins ( 0,50 de haut), il emportait une charge explosive entre 60 et 100 kgs. Il fut employé au début de la guerre, ensuite en Pologne et enfin sur le mur de l’ Atlantique. Un seul exemplaire va y exploser car les autres furent retrouver rouillés par les embruns et le sel marin.
Je peux prouver aujourd’hui et certifier que ce n’est pas de telles engins blindés qui auraient explosés et qui n’ont put se trouver sur les lieux incriminés. Ayant une vitesse de 10 km heure, ils n’auraient pu partant de la rue Sainte Marguerite cheminer jusqu’aux carrefour du Cadran et de Hocheporte? Seuls des véhicules blindés ayant des conducteurs à bord pouvaient se déplacer avec un vitesse leur permettant d’échapper à d’éventuelle sabotage. On peut vous retracer aujourd’hui et vous laisser imaginer le déroulement de cette atrocité commise par les soldats allemands.
J’ai pu enfin retrouver et questionner plusieurs acteurs présents, ayant vécus ces heures dramatiques. Ces Souvenirs furent souvent refoulés au fond de leur mémoire. D’ou les difficultés par eux à me conter ce qu’ils avaient vécus ce jour là. Ils furent recoupés par des acteurs aujourd’hui disparus, souvent gravement meurtris , mais ayant survécu à leurs blessures.
Grace à un cliché pris à la sauvette par Monsieur Mardaga, au péril de sa vie, d’une fenêtre de l’immeuble n° 121 de la rue Sainte Marguerite, j’ai pu avec certitude éclairer mes doutes.
Mais revenons en ces temps de conflit, d’après le débarquement alliés du 6 juin 1944.
Depuis de nombreux jours , de nombreux mois , les armées de l’Axe battent en retraite par toutes les routes du pays. Fuir et rester en vie est devenu le mot d’ordre des vainqueurs de 1940.
Dès le 3 septembre 1944, les armées allemandes en longs convois, empruntent la rue Louis Fraigneux. Ce témoignage me fut donné par mon père Joseph ,qui nous a décrit cette exode commencé trois à quatre jours avant les événements dramatiques. Cette rue est devenue depuis la voie rapide. De nombreuses voitures hippomobiles attelées de chevaux de fermes et de rares camions, couverts de branchages feuillus défilent par la chaussée. Ils sont chargés d’hommes casqués, de meubles et de caisses en bois entassés. Parfois, de plus rares canons ou des automobiles dérobées aux civils et surchargées, participent à cette caravane militaire hétéroclite. La peur d’une attaque aérienne par l’aviation alliée ou d’éventuelles actions violentes des résistants belges se lit sur les visages de la troupe en déroute. Depuis longtemps, le plan de destruction retardatrice est bien étudié par l’état-major allemand. La Meuse est un rempart et les ponts sont prêt à sautés. Mais il faut laissé du temps pour que toutes leurs troupes puissent faire retraite.
Dans la nuit du 6 septembre 1944, les allemands font entrer trois petits blindés dans la cour de l’école communale , située face au monument aux morts de la guerre 1914-18 et de l’église Sainte Marguerite. Leur petite largeur et leur faible hauteur leurs à permis de franchir le porche de l’école. Leur dimension hors tout faisant environs 2,10 mètres de large. Ils sont du type panzerkampfwagen I .Ceux-ci sont identifiés grâce à la photo et aux nombreux témoignages recueillis.
Conçu dans les années 1930, à cause de son faible blindage , ce petit type de char fut vite surclassé et employé dans d’autres fonctions que le combat. Souvent ils ont servis de transport de munitions pour les chars Tigres et les Panthers, ces engins étant plus protégés par leur blindage épais.
Ces petits chars sitôt rentré dans la cour de l’école , les soldats « vert de gris » s’activent à une secrète besogne. Toutes la nuit, ils vocifèrent des ordres entre-coupés bientôt de chansons de troupe. Il semblerait qu’ils disposent de boissons alcoolisées car les chants se font de plus en plus décousus et bruyants. Ces renseignements me furent communiqués par plusieurs témoins dont le patron de la boucherie de la rue Sainte Marguerite n° 95. Situé non loin de l’école, le propriétaire de cette immeuble entendait ce vacarme trouant le silence de la nuit. Ces faits me furent confirmé par certains membres de la famille Van Gathoven , chaussure » Pécasse » de la rue Sainte Marguerite n°89.
Mais voici le jour qui se lève sur le quartier de l’Ouest. Les soldats Américains et Britanniques sont sur les hauteurs de la ville de Liège.
Les rues se vident . Seul deux files de clients « font la queue » devant les deux boulangeries de la rue, situées au n° 142 et 129. Elles seront bientôt ouvertes et les clients pourront enfin échanger leurs tickets de rationnement contre un pain noir , légèrement gluant, et plein de son. Les futures victimes, étant inquiètes devant le va et vient de la soldatesque ennemie, se renseignent auprès de ceux-ci. Répondant aux questions des civils, les patrouilles allemandes ont eut soin de rassurer les enfants, les femmes et les vieillards qui composent ces files d’attendes. Celles-ci se voient sur le cliché.
Il n’y a que de très rares habitants dans les rues de peur d’être tirés comme des lapins. Les « boches » patrouillent l’arme pointée vers les fenêtres de peur d’une attaque des maquisards. Toutes les fenêtres de notre maison du n°18 rue Sainte Marguerite sont grandes ouvertes. Ainsi en cas d’explosion les vitres ne seront pas soufflées comme le conseille, Louis mon grand-père , lui l’ancien combattant de 14-18 . curieux, je me hisse avec l’aide de mon père sur le bord de la fenêtre du premier étage. Je regarde vers le haut de la rue. Le soleil brille sur le gros panzer qui est stationné, et entouré de nombreux soldats, au pied des rues Publémont et Hulos, devant l’immeuble n°77. Ses flancs sont cachés par d’ énormes plaques d’acier, des jupes de métal.
Son long canon est pointé vers le carrefour de Fontainebleau. IL est presque midi, les trois petits chars sortent de l’école comme le montre la photo ( voir plus haut). Sur celle-ci on entrevoit le panzer à l’affût et un petit char qui monte , tandis que les deux autres prennent la direction du bas du quartier. Un va exploser au cadran tandis que l’autre sautera Place Hocheporte. Le petit char semble zigzaguer en remontant la rue Sainte Marguerite, vers Fontainebleau . Jean Bielen, fils du légumier Théodore Bielen, le voyant depuis le magasin n° 96 Rue Sainte Marguerite, dira à ses parents « Ils sont morts-saoul du péket qu’ils ont bu la nuit » le tout en patois liégeois. Le petit char remonte toujours en cahotant sur les pavés de pierres devant les rares curieux.
Et soudain un homme, Maurice Waha, membre de l’armée secrète surgit du café où les amateurs de courses de pigeons d’avant-guerre, se réunissaient.
Il saute sur le petit panzer en criant aux gens de prendre la fuite . Il essaye , peut-être d’arrêté le petit blindé ou de le faire dévier.
Maurice Waha, le chartier sur son tombereau , chargé de charbons de la mine toute proche, fait son dernier voyage dans la rue qu’il a tant parcourue. Et dans un grand boum,….. ; le gros panzer a tiré. Il a fait exploser le tout. Des cris ,des râles, des enfants, des femmes et des hommes hébétés, titubants, ensanglantés se dirigent vers les pharmacies Pichaut situées au n°90 et Ducobu au n°51 . Celles-ci vont se transformer en poste de premiers secours.
De la fenêtre du premier étage du n° 18 , j’ai encore dans la mémoire la vue de ce le long canon qui crache une flamme de mort, puis, le bruits de l’explosion .
Je vois encore le mastodonte d’acier qui recule sous la puissance de son tir. Et aussi, l’ énorme boule de lumière bleutée qui a suivi les fils électriques du tram n° 12, due au court-circuit électrique. Mon père m’empoigne et m’entraîne vers les caves de notre immeuble contigu de la rue Coremolin servant d’abris.
Nous entendons, ma famille et moi le bruit métallique des chenilles des blindés qui descendent vers le carrefour du Cadran.
Une deuxième explosion surprend toute la famille pendant que nous nous descendons les escaliers vers la cave . C’est le carrefour du cadran qui est détruit, comme nous l’apprendrons plus tard. Elle sera suivie d’une troisième plus sourdes, c’est celle du carrefour de Hocheporte où les immeubles brûleront pendant de nombreuses heures de la nuit.
Les Pompiers auront d’ailleurs toutes les peines du monde a éteindre les incendies car les soldats ennemis avaient eu soins de couper les tuyaux et de saboter les autopompes dans les proches casernes des pompiers.
En entendant des bruits de pas ,des cris, nous remontons prudemment de la cave .
Quand je repense à ces moments, je revoie les trottoirs avec leurs longues traces de sang et les gémissements des blessés qui se dirigent vers les hôpitaux. Le carnage fera 97 morts et de nombreux blessés qui décéderont dans les jours suivants.
Heureusement aujourd’hui les hommes vivent chez nous, dans une paix retrouvée, mais pour combien de temps ?
Jean Schellings 2017
Sources / témoins :
Mr Jean schellings
Mr Michel Thonnard